santésuisse demande des réformes efficaces pour éviter de fortes hausses de primes à l’avenir
L’équation est simple: des coûts plus élevés entraînent des primes plus élevées. Les coûts des médicaments, des soins, de la psychothérapie et de la physiothérapie ont bondi en 2023. C’est pourquoi une augmentation des primes de 8,7 en moyenne est nécessaire en 2024. Dès lors, des mesures urgentes s’imposent, comme l’alignement des tarifs des laboratoires et des prix des médicaments sur ceux pratiqués en Europe de même que l’augmentation de la remise des génériques. Ces mesures permettraient d’économiser plus d’un milliard de francs. À moyen et long terme, des améliorations significatives sont nécessaires, notamment en matière de planification des soins par les cantons pour les hôpitaux et les médecins.
Au premier semestre 2023, les coûts par assuré ont augmenté de 6,4 pour cent. Les médicaments enregistrent, à cet égard, la plus forte hausse des coûts. Ils représentent aujourd’hui près d’un quart des coûts totaux de l’assurance de base. Ce sont surtout les nouveaux médicaments onéreux qui pèsent lourd dans la balance. De plus, les génériques sont en moyenne deux fois plus chers en Suisse que dans les autres pays européens et leur part reste relativement faible. Vendredi dernier, le Conseil fédéral a enfin agi en baissant le prix des génériques. Cela est certes un pas dans la bonne direction, mais d’autres mesures doivent suivre. Les prix des analyses de laboratoire, par exemple, sont aussi beaucoup trop élevés: en comparaison européenne, la même prestation coûte plus de deux fois plus cher en Suisse.
Dans le domaine des soins également, les coûts ont augmenté de manière disproportionnée cette année. Avec une hausse de 6 pour cent, ce sont surtout les coûts de l’aide et des soins à domicile qui ont fortement progressé. La psychothérapie pratiquée par des psychologues a également enregistré une forte croissance, car ces derniers sont autorisés à facturer de manière autonome et à des tarifs plus élevés depuis le 1er juillet 2022. Enfin, la physiothérapie et les séjours dans les cliniques de réadaptation ont également connu une nouvelle hausse.
santésuisse demande des mesures immédiates
Des réformes en profondeur sont indispensables pour freiner l’évolution des coûts. Mais parallèlement, des mesures immédiates, comme celles qui suivent, devraient être mises en œuvre de suite et permettraient de réaliser des économies substantielles:
- Nouvelle baisse des tarifs des laboratoires de 10 à 15 pour cent: 100 – 150 millions de francs
- Réduction des marges de distribution des médicaments: 300 millions de francs
- Baisse des prix des génériques: 300 millions de francs
- Augmentation de la part des génériques: 150 millions de francs
- Définition de critères d’efficacité clairs pour les tarifs hospitaliers: 200 millions de francs
Le potentiel d’économies à court terme de ces mesures immédiates s’élève à plus d’un milliard de francs, soit 3 à 4 pour cent des primes.
santésuisse demande un arrêt immédiat de l’extension du catalogue de prestations
Le Parlement dispose de différents leviers pour faire des économies sans nuire à la qualité élevée de notre système de santé.
- Le catalogue des prestations de l’assurance de base ne cesse d’être élargi depuis des années, comme avec la prise en charge des coûts du matériel pour les soins ou les nouvelles compétences accordées aux infirmiers, aux psychologues et aux pharmacies. Il faut stopper de toute urgence cette évolution délétère.
- Il est également urgent de vérifier l’impact sur les coûts des projets de réforme en cours. Ainsi, si les coûts des soins étaient intégrés dans le projet de financement uniforme des traitements ambulatoires et stationnaires (EFAS), une nouvelle hausse des coûts de 5 milliards de francs à la charge des payeurs de primes serait inévitable.
- Les prestations inefficaces ne doivent plus être remboursées: si une procédure scientifique (HTA) démontre qu’un traitement n’apporte aucun bénéfice voire un bénéfice insuffisant, il doit être retiré du catalogue des prestations. Les HTA déjà réalisés permettraient, à eux seuls, d’économiser 200 millions de francs s’ils étaient mis en œuvre. Cela protégerait en outre les patientes et les patients de traitements inutiles, voire même parfois nocifs.
Des réformes en profondeur sont indispensables
Il est urgent de mettre en place une planification améliorée et suprarégionale des hôpitaux. Aujourd’hui, les cantons n’assument pas suffisamment leurs responsabilités en matière de planification des soins stationnaires et d’admission des fournisseurs de prestations. Trop de médecins exercent dans les villes, notamment des spécialistes. Une planification hospitalière suprarégionale permettrait d’adapter l’offre aux besoins réels de la population. Il en résulterait d’une part une réduction des coûts et d’autre part une amélioration de la qualité des traitements, car les hôpitaux pourraient se concentrer sur les domaines où ils excellent.
L’utilisation obligatoire, à large échelle, du dossier électronique du patient (DEP) créerait la transparence nécessaire pour des mesures d’amélioration de la qualité. L’obligation pour tous les fournisseurs de prestations d’utiliser le DEP permettrait d’obtenir rapidement des résultats positifs. Le DPE apporterait de nombreux avantages aux patients, simplifierait la coordination au sein du système de santé et permettrait d’éviter la répétition d’examens ou de traitements inutiles.
Le recours à des tarifs forfaitaires, également pour les traitements ambulatoires, devrait enfin être établi dans les années à venir. Outre le fait que ceux-ci minimiseraient les incitations à prodiguer des traitements inutiles, ils permettraient aux patients de savoir beaucoup plus facilement quelles prestations ont été effectivement fournies.
Enfin, les modèles d’assurance alternatifs peuvent également contribuer à freiner l’évolution des coûts. Aujourd’hui déjà, près de trois quarts des assurés choisissent un tel modèle et bénéficient ainsi d’un traitement coordonné de haute qualité. Le développement de ces modèles d’assurance peut contribuer à maîtriser les coûts. Il s’agit, par exemple, de modèles dans lesquels l’assurance verse au fournisseur de prestations une rémunération fixe par patient et par an. Cela inciterait à ne réaliser que les traitements nécessaires et efficaces, et à maintenir les patients en aussi bonne santé que possible.
Les politiques doivent agir maintenant pour que les primes restent abordables à l’avenir.