De nouvelles solutions doivent être trouvées rapidement pour les soins, faute de quoi les coûts finiront par échapper à tout contrôle. En 2022, les dépenses totales dans ce domaine atteignaient déjà 6,5 milliards de francs. L’offre de soins à domicile, notamment, est de plus en plus étoffée et chère, comme le montre de manière frappante le nouveau rapport sur les soins de santésuisse. Il est urgent de mener des réformes en profondeur.
Les exigences vis-à-vis de l’assurance obligatoire des soins ne cessent de croître. L’assurance de base finance notamment de plus en plus de prestations de soins, comme le révèle le nouveau rapport sur les soins de santésuisse. Entre 2011 et 2022, les coûts dans les établissements médico-sociaux (EMS) ont bondi de 42 pour cent, pour s’établir à 4,5 milliards de francs; pour les soins à domicile, la hausse a même été de 124 pour cent, pour un total de quelque 2 milliards de francs. La majeure partie de ces coûts est prise en charge par les assureurs-maladie par le biais de l’assurance de base: les dépenses ont atteint près de 3,4 milliards de francs en 2022. Le reste a été payé par les cantons (2,4 milliards de francs) et les patients (752 millions de francs). Au total, la part des soins s’est élevée à 13 pour cent des coûts totaux de l’AOS au cours de cette année.
EFAS: une menace supplémentaire
Et la situation risque encore de s’aggraver avec la mise en oeuvre de l’initiative sur les soins et l’introduction du financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS). santésuisse demande par conséquent au Conseil fédéral, aux milieux politiques et aux autres acteurs de la santé de prendre des mesures d’économie urgentes. «Des réformes sont nécessaires dans différents domaines et sont possibles sans rogner sur les prestations», affirme Verena Nold, directrice de santésuisse. La planification des EMS, par exemple, devrait être faite à l’avenir au niveau suprarégional, afin d’éviter de créer des places qui ne sont pas réellement nécessaires. Il faut aussi débattre de toute urgence du financement des soins prodigués par les proches aidants. Des garde-fous clairs et une réduction sensible de la contribution versée aux organisations qui engagent des proches aidants devraient être les conditions préalables à la poursuite du financement par l’AOS. De plus, en vue de l’introduction de l’EFAS, la base de données doit être nettement améliorée afin de permettre à l’avenir une tarification objective.
Tendance claire: hausse des soins à domicile
Comme le révèlent clairement les statistiques, l’offre de soins à domicile a été considérablement étoffée depuis l’introduction du nouveau régime de financement des soins. Alors que 1410 fournisseurs de prestations étaient initialement enregistrés, leur nombre a grimpé à 2708 (+92 pour cent) jusqu’en 2022. A contrario, le nombre d’EMS a légèrement reculé durant la même période (de 1585 à 1485 prestataires). En parallèle, les patients sont de plus en plus âgés: plus de la moitié des prestations de l’assurance de base dans les EMS concernent des personnes de plus de 85 ans, et plus de la moitié des soins à domicile sont prodigués à des patients de plus de 80 ans.
Évolution des soins requis
Le nombre d’heures de soins par patient est demeuré constant entre 2012 et 2022, mais leur répartition entre les échelons de soins requis a évolué, ce qui se répercute négativement sur les coûts: la part des jours de soins dans les échelons 1 à 3 diminue ainsi de plus en plus au profit des échelons 4 à 9. Les heures de soins dans les échelons les plus élevés (10 à 12) ont aussi légèrement augmenté. Pour déterminer les soins requis, les établissements stationnaires suisses font appel à trois instruments de saisie différents. Selon l’instrument utilisé, les résultats diffèrent complètement chez des personnes ayant pourtant un niveau de soins requis identique (voir page 6). Cette inégalité perdure depuis des années et doit enfin être éliminée. Pour santésuisse, il ne fait aucun doute que les acteurs concernés doivent enfin uniformiser les instruments de saisie des soins requis.
Mesures urgentes à prendre
Pour pouvoir continuer à financer les soins, des changements sont indispensables. santésuisse demande les mesures suivantes:
- Tous les acteurs doivent veiller à ne pas laisser les coûts à charge de l’assurance de base augmenter encore davantage. La base de données doit être améliorée afin de permettre une tarification objective en vue de l’introduction du financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS).
- La planification des EMS doit se faire au niveau suprarégional et supracantonal. Avant d’augmenter le nombre de places disponibles dans les EMS, les cantons doivent remplir leur devoir de coordination et s’assurer qu’elles sont réellement nécessaires.
- Le niveau de soins requis doit être déterminé de manière uniforme dans les EMS. Il n’est pas acceptable que des personnes soient attribuées à des échelons différents en fonction de leur lieu de résidence. Il faut enfin harmoniser les trois instruments de saisie des soins requis.
- Il convient de discuter des possibilités, du financement et des garde-fous à prévoir dans les soins fournis par les proches aidants, afin de contenir la forte hausse des coûts. Il n’est pas acceptable, par exemple, que des personnes à la retraite facturent les soins apportés à leurs proches via l’AOS.
- Les données disponibles sur les soins ambulatoires doivent être améliorées très rapidement. Comme pour les EMS, il faut tenir une comptabilité analytique qui indique la charge effective des soins et de l’accompagnement par domaine de prestations.
